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Jules Barbey d'Aurevilly |
Dans la première nouvelle des Diabolique, un narrateur se souvient
d’une jeune fille qu’il avait rencontrée chez des gens qui lui louaient une
chambre. Ils la lui présentèrent comme leur fille. Plus que sa beauté, ce qui
frappa fortement le jeune homme de 17 ans à l’époque fut « l’air qu’elle avait » (c’est moi qui
souligne). « Une espèce d’air impassible, très difficile à caractériser. »
Cet air « qui la séparait non pas seulement de ses parents, mais de tous
les autres, dont elle semblait n’avoir ni les passions, ni les sentiments, vous
clouait... de surprise... sur place. » Cet air « n’était ni fier, ni
méprisant, ni dédaigneux, non ! mais tout simplement impassible, car l’air
fier, méprisant, dédaigneux, dit aux gens qu’ils existent, puisqu’on prend la
peine de les dédaigner ou de les mépriser, tandis que cet air-ci dit
tranquillement : « Pour moi, vous n’existez même pas. »