Je ne suis pas un loser
magnifique. Plutôt un raté au sens de celui qui n’a pas tenu ses promesses. A
vingt ans, je voulais devenir un artiste plus ou moins célèbre. J’ai gagné un
peu d’argent avec mes dessins mais jamais assez pour vivre correctement. J’étais
une catastrophe en relations publiques. Au bout d’une dizaine d’années, je
m’étais mis à dos à peu près tous les professionnels rencontrés. J’ai rangé mon
carton à dessin et j’ai passé un concours d’enseignement. Après m’être fait
virer de l’université (mon seul titre de gloire), j’ai végété une vingtaine
d’années dans une ZEP à la dérive. J’étais dans mon élément. Bilan à la
retraite : j’ai limité la casse ; je n’ai pas été renvoyé ; je
ne suis pas devenu alcoolique ou accro aux cachetons. Mon ange gardien a fait
ce qu’il a pu. Je lui suis reconnaissant ; ce n’était pas un boulot
facile.