G-0C9MFWP390 Le Carnet de Joe Legloseur: lecture
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samedi 21 juin 2025

(Love Is Like a) Heat Wave

 

Bill Térébenthine

27° à 11 heures. Ce n’est pas désagréable. On peut s’échouer en toute légalité sur le patio et lire du Bukowski à l’ombre. Autour, la ville est silencieuse. Le trafic routier semble ralenti. Personne ne se balade dans la rue en parlant fort ou en riant aux éclats. L’activité humaine est ralentie. Comme quoi c’est possible. J’ai essayé de lire des trucs sur la guerre mais ça ne m’a pas accroché et je suis revenu à Women en me disant que cette maison avait un côté californien (sans la piscine). Cela va bientôt faire un an que nous sommes là et c’est le temps qu’il aura fallu pour commencer à s’y sentir bien. L’environnement de la maison précédente était tellement laid et agressif qu’il a fallu tout ce temps pour se détendre et baisser la garde. Quand tout va bien, je me demande d’où et quand vont venir les ennuis.

mardi 17 juin 2025

Dialogue

 

— La manière que tu as de te précipiter dans ton fauteuil dès que tu en as l’occasion pour te plonger dans ton livre a quelque chose de désobligeant.

— Les discours qui prétendent encourager la lecture sont des faux semblants. Les lecteurs ont toujours dû se cacher pour s’adonner à leur plaisir.

 — Pourrais-tu me dire ce qu’il y a de si captivant dans ce que tu lis en ce moment ?

— Je ne suis pas critique littéraire mais je peux te lire un passage de ce roman de Nabokov. Nous sommes près de la fin. Le narrateur a reçu un télégramme lui annonçant que Sebastian Knight est sur le point de mourir. Il s’est précipité dans un train pour se rendre sur place, à la campagne. Extrait : « Parmi les nuages beige, il y en avait un couleur chair, et, dans le solitude tragique des champs dénudés, les plaques de neige en dégel se coloraient d’un rose mat. Une route surgit et glissa durant une minute le long du train, et juste avant qu’elle ne disparût à un tournant, on vit un homme à bicyclette y zigzaguer parmi la neige et la fange et les flaques. Où allait-il ? Qui était-il ? Personne ne le saura jamais. »

— Et ?

— Quand je tombe sur un passage comme celui-ci, j’imagine Nabokov peaufinant sa description sur l’une de ses fameuses fiches jusqu’à obtenir la clarté et la précision souhaitée. Je précise que ce trajet en train est présenté par le narrateur comme particulièrement pénible, le wagon est bondé, les voyageurs sentent mauvais et il craint d’arriver trop tard à destination.

— Et si nous instaurions un nouveau rituel. Tu me lirais de temps en temps un passage que tu as particulièrement apprécié.

— Validé.

jeudi 12 juin 2025

Avec Nabokov

 

Je me souviens avoir commencé par Lolita sur les conseils d’une fille à qui je venais de raconter le scénario de ma bande dessinée. J’avais 24 ans, des projets grandioses, et je travaillais comme veilleur de nuit dans un hôtel pour payer les pâtes et les cigarettes. Le roman de Nabokov m’avait aidé à tenir jusqu’au bout de la nuit derrière mon bureau de la réception. J’attendais ce moment. Et puis il y eut la période Ada ou l’ardeur qui fut assez longue (le roman est épais et je lis lentement). J’ai le souvenir d’une narration virtuose d’une liberté folle dans laquelle j’aimais me perdre. En ce moment, je lis avec un grand plaisir La vraie vie de Sebastian Knight, son premier roman en anglais. Le récit est une mise en abîme de la situation de Nabokov en tant qu’écrivain au moment de l’écriture du livre. En gros, le narrateur veut écrire sur Sebastian Knight, son demi-frère qu’il a peu connu et dont il admire les romans. Nabokov se plait à mettre en place une machinerie sophistiquée avec extraits des œuvres, témoignages contradictoires de ceux qui l’ont connu, critique d’une biographie médiocre et enquête sur les lieux où a vécu le sujet des recherches. C’est élégant, drôle, brillant, et d’une grande beauté. 

jeudi 5 juin 2025

Lecture

Jules Barbey d'Aurevilly

Dans la première nouvelle des Diabolique, un narrateur se souvient d’une jeune fille qu’il avait rencontrée chez des gens qui lui louaient une chambre. Ils la lui présentèrent comme leur fille. Plus que sa beauté, ce qui frappa fortement le jeune homme de 17 ans à l’époque fut « l’air qu’elle avait » (c’est moi qui souligne). « Une espèce d’air impassible, très difficile à caractériser. » Cet air « qui la séparait non pas seulement de ses parents, mais de tous les autres, dont elle semblait n’avoir ni les passions, ni les sentiments, vous clouait... de surprise... sur place. » Cet air « n’était ni fier, ni méprisant, ni dédaigneux, non ! mais tout simplement impassible, car l’air fier, méprisant, dédaigneux, dit aux gens qu’ils existent, puisqu’on prend la peine de les dédaigner ou de les mépriser, tandis que cet air-ci dit tranquillement : « Pour moi, vous n’existez même pas. »

 

 

mardi 3 juin 2025

Sensations fortes

 

Dans la série « Découvrons les vieux livres qui trainent dans la bibliothèque », aujourd’hui : Les Diaboliques de Jules Barbey d'Aurevilly. Après avoir contemplé l’illustration de couverture (le nom de l’artiste n’apparait pas), commencer par enfoncer son nez entre les pages du livre entrouvert. Le parfum qui vous assaille est lourd, puissant. Il faut faire un effort pour s’en arracher tant sa force d’attraction semble vous entrainer vers des passés lointains. Les pages jaunies sont à manipuler avec une infinie précaution. L’une d’entre elles s’est déjà détachée. Cette fragilité et l’attention qu’elle implique donnent aux séances de lecture l’aspect d’un rituel secret parfaitement adapté à cet écrivain. Julien Gracq rappelle dans sa préface la haute personnalité du dandy. Il prévient le lecteur qui doit se laisser emporter par ce conteur à forte personnalité dont le style chevaleresque imprègne chacune des nouvelles qui composent le livre.   


samedi 31 mai 2025

Lu


 Pierre Siniac, Les sauveurs suprêmes. Le livre est publié dans la Série noire mais il ne s’agit pas d’un roman noir. Je m’attendais à une sorte de polar à la française du genre Léo Mallet avec ambiances banlieusardes glauques et ton célinien. En fait, pas du tout. On a affaire à un récit de guerre très bien documenté. Trois paumés errants au milieu des décombres dans l’Italie de la fin de la deuxième guerre mondiale se retrouvent un peu par hasard réunis pour une mission : libérer un chef de la résistance antifasciste aux mains des SS qui s’apprêtent à le fusiller avant de battre en retraite devant la progression des Alliés. Le ton est assez original. Pas d’héroïsme idéalisé mais au contraire trois bonhommes assez minables motivés par une seule chose : l’appât du gain (on leur a promis une très grosse récompense). Siniac mène le récit d'un main de maître. 

mardi 27 mai 2025

Signes annonciateurs


 Dans un roman du XIXème comme Pierre et Jean de Maupassant qui se trouve actuellement sur ma table de nuit, le récit est parsemé de signes annonçant les évènements dramatiques à venir. C’est l’occasion pour le spécialiste qui a préfacé le roman de semer des notes au fil du texte en soulignant les récurrences de certains mots, de certains thèmes et en pointant des détails annonciateurs dissimulés dans le décor. On peut trouver le procédé un peu lourd et, finalement, assez peu réaliste. Jusqu’au moment où on repense à des scènes passées qui ont suscité un malaise inexplicable à l’époque et qui aujourd’hui résonnent de manière troublante, maintenant qu’on connait la suite. Les signes avant-coureurs existent donc en dehors des romans. Hélas, le plus souvent, nous n’avons pas su (ou voulu) les détecter.

jeudi 15 mai 2025

Scénario

 

Dans un court essai sur le roman, Maupassant déclare que l’écrivain réaliste ne peut pas « tout raconter ». « Il faudrait alors un volume au moins par journée pour énumérer les multitudes d’incidents insignifiants qui emplissent notre existence. » Pour illustrer la nécessité de faire des choix, il prend l’exemple des accidents. Beaucoup de personnes en meurent chaque jour. « Mais pouvons-nous faire tomber une tuile sur la tête d’un personnage principal, ou le jeter sous les roues d’une voiture, au milieu d’un récit, sous prétexte qu’il faut faire la part de l’accident ? » Je pense que ce serait une excellente idée. Imaginons une scène de film ou de roman. Le personnage principal est en train de parler avec un autre personnage. Soudain, il s’écroule au milieu d’une phrase. Paf. Une balle perdue. Le tir d’un chasseur si les personnages se promènent dans les bois ou bien un règlement de compte entre bandes rivales s’ils marchent dans les rues d’une ville.


mercredi 14 mai 2025

Slogan


 « J’écris, c’est cela l’important. Non pas ce que j’ai écrit, mais le fait d’écrire en soi. » Je voulais développer un peu sur le thème de l’écriture à partir de cette citation d’Henry Miller et puis j’ai dérivé en ironisant sur les incitations à la lecture. Je reprends le fil. Cette phrase correspond à ce qui m’anime ici. J’ai d’ailleurs déjà dû formuler cette idée plusieurs fois dans les carnets. J’ai songé à la placer en exergue dans un coin du blog mais j’ai la flemme, et puis j’ai trouvé que ce serait prétentieux et ridicule. Pas de déclarations, des actes. Comme Dolly Parton qui, je l’ai appris en regardant un documentaire (sur Arte), a créé une fondation pour distribuer des livres aux enfants. C’est plus efficace que les discours sur les bienfaits de la lecture.



lundi 12 mai 2025

Vive la lecture !


 Maintenant qu’il s’agit d’une cause perdue, on peut bien l’encourager (surtout auprès des jeunes) ; c’est sans risque. La lecture est une activité d’individu solitaire, égoïste, asocial. Elle est à l’opposé des élans collectifs que la société tente d’encourager par tous les moyens avec plus ou moins de succès : finale de foot, nouveau pape, guerres et commémorations, mort d’une célébrité du spectacle... La lecture est dans notre cas une mauvaise habitude prise très tôt pour échapper à l’ennui de la famille, de l’internat, du travail. Une évasion ? Vous ne croyez pas si bien dire. Mais, c’est le côté un peu magique de la chose, tout en étant ailleurs, et parfois très loin, on se trouve intensément présent durant le temps de la lecture. C’est inexplicable, surtout pour les non-lecteurs ou pour ceux qui lisent uniquement dans le but de se rendre plus efficaces (on dit « monter en compétence »). Lire ne sert qu’à une chose : donner du plaisir à celui qui s’y adonne et rien d’autre.

 

samedi 10 mai 2025

La véritable histoire d'Actéon

 

J’apprécie particulièrement, dans J’écris l’Illiade, la proximité naturelle avec les dieux. Comme ça, sans préliminaires ni emphase, sans invocation occulte et surtout rien de religieux. Le monde d’avant (le vrai), comme si les siècles de monothéisme avaient compté pour du beurre. Et avec une grande inventivité, comme lorsque nous sommes entrainés dans les pas d’Actéon. Le récit mythologique, je l’avais découvert avec le tableau de François Clouet intitulé « Le bain de Diane » exposé au Musée des Beaux-Arts de Rouen. Michon le connait de l’intérieur ; il y était. Et il sait comment les choses se sont passées. Contrairement à ce que raconte la légende, la déesse pudique n’a pas été surprise dans sa nudité par le chasseur curieux. Ce qui s’est joué entre eux deux relève de la complicité silencieuse, un échange visuel du type exhibition/voyeurisme. La déesse étant allée trop loin dans le plaisir pris à ce jeu, on comprend mieux la violence avec laquelle elle a châtié son complice.


mardi 6 mai 2025

Abondance

 

Avec Pierre Michon cuvée 2025, on a à la fois une écriture qualité supérieure et du sexe. Des pages lyriques pour décrire le remplissage d’une locomotive à vapeur lors d’une halte de nuit en rase campagne. Le bras de la citerne au-dessus de la locomotive dont le moteur tourne au ralenti en laissant échapper des bruits évocateurs devient alors, dans la prose fiévreuse de Michon, une métaphore excitante de l’acte sexuel. Des pages lubriques dans lesquelles le jeune narrateur s’abandonne dans un compartiment avec une brune qui jouit en criant Mamma Mia. On enchaine avec le vieil Homère rêvant de la très désirable Hélène, prostituée sublime, qualifiée de « chair à dieux ». Puis soudain, au détour d’un souvenir, on tombe sur cette phrase : « L’homme est une machine de guerre ; dès qu’il vous rencontre, il note avec soin les points faibles de votre citadelle. » Le reste est souvent de ce niveau. On pense à Salammbô plus d’une fois, ce qui donne une idée du niveau. On se prend à s’inquiéter pour les prochaines lectures qui risquent de paraître fadasses. Mais c’était déjà le cas avec Jim Thompson. Tous les bons livres, en fait.


samedi 26 avril 2025

Retraduire


Le livre de Paul Cain est traduit par
 Jacques-Laurent Bost et Marcel Duhamel en personne. La version française est agréable à lire, épurée, efficace, précise. D’où la surprise en découvrant une erreur incompréhensible. A un moment, les personnages doivent attendre quelqu’un dans une chambre d’hôtel. Le héros fait un somme tandis qu’un comparse a trouvé un « livre comique » pour s’occuper. Ce qui ne veut pas dire grand-chose. Il s’agit plutôt d’une bande dessinée (comic book). Il y avait pourtant un indice un peu plus loin : le personnage dit au héros que sa lecture lui a plu et qu’il aurait adoré « dessiner des caricatures ». Cette faute justifierait à elle-seule que le roman fasse l’objet d’une nouvelle traduction. Ce serait l’occasion d’actualiser certains dialogues alourdis par un argot vieillot qui sonne étrangement « tontons flingueurs ».

vendredi 25 avril 2025

Une issue

 

François Angelier, l’homme de Mauvais genre, trouve le réel «  d'un ennui sombre, tragique, bloqué, totalement sans intérêt » et il a bien raison. Pour prendre un exemple au hasard, qu’y-a-t-il de plus borné et prévisible qu’un agent immobilier ? Bref, le réel nous gonfle sérieusement et le fait de le scénariser sur le modèle des mauvaises séries puis de le diffuser non-stop sous forme d’info-spectacle n’y change rien. Ce sera toujours « d'un ennui sombre, tragique, bloqué, totalement sans intérêt ». Heureusement, on peut lire des nouvelles de Maupassant tendance fantastique et se laisser entrainer du côté de cet « inconnu qui est derrière le mur, derrière la porte, derrière la vie apparente ».


samedi 19 avril 2025

Lu


Sans craindre les anachronismes, on pourrait dire qu’il s’agit d’une sorte de road movie dont l’auteur déclare dès l’incipit qu’il ignore tout des deux personnages principaux, d’où ils viennent, où ils se dirigent et dans que but. Ce narrateur désinvolte intervient d’ailleurs tout au long de cet antiroman pour apostropher directement le lecteur. Les récits racontés par Jacques, son maître ou des personnages rencontrés dans des auberges sont souvent interrompus. Curieusement, ces interventions et ces interruptions narratives ne nuisent pas au plaisir de la lecture. Les autorités de l’époque (pouvoir royal et religieux) ont dû faiblement apprécier l’inversion des rapports de pouvoir entre Jacques et son maître tout comme le souffle de liberté qui traverse le roman.

vendredi 18 avril 2025

Série Noire


 « Lorsque Kells rangea sa voiture dans la quatrième Rue entre Broadway et Hill Street, les réverbères électriques et les enseignes lumineuses commençaient juste à s’allumer. Il entra dans l’immeuble qui faisait le coin, monta au troisième et longea le corridor jusqu’à une fenêtre donnant sur la Cinquième Avenue. Il resta quelques minutes devant la fenêtre à surveiller le va-et-vient sur le trottoir d’en face. Puis il retourna à la voiture. »

Si on me demandait ce que j’ai fait de ma semaine ? A part être assommé par une grippe (ou un covid grippal), j’ai commencé la lecture de A tombeau ouvert, un polar de Paul Cain cité par Manchette comme l’un de ses préférés parmi les classiques de la Série Noire. On comprend vite pourquoi. Le style purement « behavioriste » est ici utilisé avec une grande rigueur. On chercherait en vain la moindre notation psychologique, la moindre évocation des émotions ou de la vie intérieure des personnages. Et c’est très beau.

mercredi 9 avril 2025

Humour noir

 

A la fin du fort bien titré Derrière les lignes ennemies, dans un dernier entretien de 1993, après avoir expliqué que la mort de Gérard Lebovici l’avait « chagriné », Manchette reconnait avoir été également inconsolable d’avoir « raté » Robert Bresson qu’il a failli écraser alors que le cinéaste traversait le boulevard Henri-IV avec une baguette sous le bras. « Je ne l’ai pas tué parce que je ne l’avais pas reconnu. On me doit les six derniers films de Bresson. » L’entretien, qui se tient dans un hôpital psychiatrique, se termine par cette phrase qui « se comprend de soi-même » : « Je préfère être fou comme je suis que normal comme Pasqua. » (On pourra remplacer le nom de cette canaille par n’importe quel malade au pouvoir qui occupe notre palpitante actualité).


lundi 31 mars 2025

L'art du portrait


 « Constance Wakefield... La quarantaine, un mètre soixante-dix ; dans les cinquante kilos.

Elle était tout en longueur ; longues jambes osseuses, longs poignets frêles, longues mains décharnées. Une de ces femmes tout d’une venue qui évoquent irrésistiblement le tuyau de poêle, sauf pour ce qui concerne la chaleur. Droite, distante. Myope et asthmatique.

Telle était Constance Wakefield.

Je ne l’ai pas encore cataloguée et je doute jamais y réussir. Je ne peux affirmer, de façon absolue, s’il s’agissait simplement d’une femme cupide et naïve ou, carrément, d’un maître chanteur. »

Et un peu plus loin :

« Elle portait deux paires de lunettes, l’une sur l’autre. Sous les verres, ses yeux exorbités ressemblaient à des huîtres nageant dans leur eau. »

Jim Thompson, Monsieur Zéro

Quelque part sur la toile, quelqu’un a écrit que ce roman était un chef-d’œuvre. Je ne suis pas loin de le penser.

vendredi 28 mars 2025

Pause vitale


 Il y a des moments où l’on a envie de ne rien faire. Ce ne sont pas les plus désagréables. Trouver un coin à l’écart, une planque bien tranquille dans un endroit abandonné. Penser à amener de la lecture. Et là, à l’abri des regards, sans l’obligation d’écouter, de répondre quelque chose, de faire preuve d’esprit de temps à autre, sans aucune forme de contrainte extérieure, se reposer pour de bon. Ecouter les bruits de la rue, regarder par la fenêtre, avancer un peu dans un roman de la Série Noire. Puis, lorsque ces précieuses minutes ont fait leur effet, se lever pour retrouver les autres et s’éloigner en fredonnant une chanson des Kinks.

lundi 24 mars 2025

Lu

Patrick Eudeline, Perdu pour la France (Editions Séguier). Lecture régressive. J’assume. Le gars est un peu frimeur. Un rocker cabossé avec des principes et qui sait raconter honnêtement des anecdotes de papy rock. Comme nous avons un certain nombre de goûts et de rêveries en commun, cela fait de lui une sorte de double qui a eu le courage de vivre jusqu’au bout les fantasmes que générait la lecture de la presse spécialisée chez les gamins des années 70. Mais le meilleur du livre, ce ne sont pas les mésaventures d’un junkie rencontrant d’autres toxicomanes plus ou moins célèbres (Syd Vicious, Nico ou Anita Pallenberg). Les passages les plus réussis se trouvent du côté des passages à vide, comme lorsque l’auteur devenu SDF descend sur la côte d’azur armé d’une guitare sèche et d’une casquette pour faire la manche chez les touristes.