G-0C9MFWP390 Le Carnet de Joe Legloseur: 1975
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vendredi 16 mai 2025

1975 (suite)

 

Je regarde une liste des "meilleurs films de 1975" et je constate que je n’en ai pas vu beaucoup sur le coup (Tommy, Dupont Lajoie). J’étais allé voir Nashville d’Altman avec un copain du lycée. Je ne suis pas certain d’avoir tout compris mais le film m’avait laissé dans un état planant propice à l’inspiration. En sortant de la salle, nous sommes allés manger dans un petit restaurant et, le vin aidant, nous avions improvisé les paroles d’une chanson pour notre groupe (il chantait, je jouais de la guitare). Nous avons noté le texte sur un bout de la nappe en papier et c’était devenu un de nos titres préférés. J’ai revu le film d’Altman récemment. C’est un chef-d’œuvre.

 


vendredi 9 mai 2025

La Grande Ourse


 Effet Michon ? Une irrésistible envie s’est emparée de moi : remonter du côté de Rimbaud, vers la Grande Ourse, en passant (et oui !) par Sollers, l’un de mes critiques littéraires favoris. J’ouvre La Guerre du goût. « C’est l’été. Je suis à Long Island. Je relis les Illuminations, le livre qui restera lorsque plus personne ne se souviendra de rien. » (Y sommes-nous ?) « En ce temps-là, seuls quelques rares passants pourrons se promener dans l’après-monde comme s’il s’agissait d’un volume ouvert à chaque moment. Je vois des phrases, des mots, les syllabes me guettent, on dirait que les signes palpitent comme ce qui fut autrefois paysage et tableau. J’éteins la télévision. » (Aujourd’hui, on dirait l’ordinateur ou le téléphone). C’est parti. Direction Rimbaud. Je prends puis repose le livre de poche de mes 17 ans. Les pages se détachent et menacent de s’envoler. Je me rabats sur un livre de lycée (Garnier-Flammarion) plus austère. 17 ans, c’était le bon âge pour lire Sensation et La Saison en enfer. Je compte sur mes doigts. Aucun doute, cela se passait en 1975. Ce qui confirmerait l’existence d’un pont temporel quantique avec ce que nous appelons aujourd’hui ?

jeudi 8 mai 2025

1975 (suite)

 

Je parcours la liste d’évènements qui se sont déroulés cette année-là et je réalise à quel point l’actualité nous laissait indifférents. La mort de Franco avait donné lieu à une couverture amusante de Reiser. C’est à peu près tout ce que j’ai retenu. Ce n’était pas un sujet de discussion entre nous. Le sujet important, c’était l’information concernant la prochaine boum, « fête musicale et dansante organisée par des adolescents », nous dit wiki qui précise que la boum est « fortement connotée aux premiers émois amoureux et à l'éveil sexuel des adolescents, à travers leurs premiers slows, dans les années 1960 et 1970. » Je ne me souviens pas de slows plus ou moins torrides. On passait plutôt notre temps à sauter sur place sur Midnight Rambler dans la version live. Après nous être secoués en rythme, nous nous écroulions inondés de sueur, souvent trop ivres pour nous occuper des filles qui devaient terriblement s’ennuyer.


jeudi 24 avril 2025

1975 (suite)


 Blood On The Tracks est unanimement considéré comme son meilleur album de la décennie. Il m’impressionnait beaucoup quand je l’écoutais dans ma chambre de lycéen. J’appréciais la musique, le chant habité, mais les thèmes abordés me passaient largement au-dessus. C’est quoi cette histoire de souffrance amoureuse ? Les vaines tentatives pour retenir celle qui s’éloigne en vous laissant « with a pain that stops and starts» (You’re A Big Girl Now), cela ne m’évoquait de précis. Maintenant, lorsque j’écoute ces chansons, je me laisse vaguement aller avec complaisance à revivre des ruptures passées, des déchirements sublimés par l’art du songwriter. 

mardi 8 avril 2025

1975 again

 

En parcourant le numéro d’avril 75 de Rock & Folk je me dis que l’âge d’or était terminé. C’était le creux de la vague. Rien d’excitant n’apparaissait plus à l’horizon. Beaucoup de choses boursouflées, surestimées, frappées d’obsolescence dès leur sortie (du genre Genesis et Yes). Les articles ne retiennent pas mon attention ; je file à la rubrique « Disques ». En ouverture, Physical Graffiti de Led Zeppelin se fait hacher menu par Manœuvre. Cela tombe bien : je n’ai jamais réussi à l’apprécier. Le groupe se résume pour moi à leur chef d’œuvre Led Zeppelin IV. Rock’n’Roll de John Lennon. Celui-là je l’ai écouté à sa sortie grâce à mon beauf, un vieux rocker qui voulait m’initier à la musique de sa jeunesse, celle des « pionniers ». Et j’ai adoré. Be-bop-a-lula, Stand By Me, Peggy Sue. Les reprises de John dégagent une joie communicative. A mon humble avis, il n’y a rien de tel que ce bon vieux rock des années 50 pour se remettre d’aplomb. D’ailleurs, je vais me le mettre pendant que je poursuis ma lecture. Je pousse le son. Qu’est-ce que ça fait du bien ! La bourse peut bien s’écrouler. Let’s rock again ! Je reprends. Mahavishnu, Van Der Graaf Generator, Tangerine Dream : beurk. A la poubelle, les déchets prétentieux. Tiens ! La BO de The Harder They Come. On découvrira cette merveille un ou deux ans plus tard. Idem pour l’album Natty Dread en « Import Givaudan ».


mercredi 26 mars 2025

1975 (suite)

 

Tel un artefact descendu de l’espace, un nouveau trimestriel de bande dessinée apparut un matin. Il y en avait une petite pile près de la caisse de la librairie-papeterie en face du lycée. On prenait un exemplaire entre les mains, on le feuilletait avec curiosité. Sur la couverture, un monstre signé Moebius nous montrait les crocs en hurlant (ou en aboyant) dans notre direction. Après quelques BD en noir et blanc, les premières pages d’ARZACH faisaient une forte impression. On restait un instant subjugué par une forme inconnue de poésie visuelle. Puis on reposait le magazine sans l’acheter. Trop cher. Trop nouveau. Trop beau. Un peu plus tard, nous allions nous y plonger longuement.


lundi 17 mars 2025

Les choses qu’on aurait eu du mal à imaginer en 1975


 A peu près tout ce qui fait l’ordinaire de nos journaux d’information aurait paru totalement probable. Nous nous serions demandé ce que nous pouvions avoir raté pour que tout parte en sucette ainsi ? Les mobilisations pour le Larzac, contre l’armée et les guerres, contre le nucléaire, pour la paix, les manifs à vélo avec Mouna, les chants de combat, de révolte et d’espoir entonnés par Béranger et autres chanteurs qu’on écoutait lors des fêtes organisée par la presse gauchiste, tout cela n’avait donc mené nulle part ? Tout ce que nous rêvions de voir disparaitre renforcé jusqu’à la caricature ? Finalement, ceux qui se sont montrés visionnaires sont arrivés un tout petit peu plus tard ; ils chantaient qu’il n’y avait pas de futur, que le monde était haine et guerre et qu’ils étaient « so bored with the USA ». 

 

samedi 15 mars 2025

1975 (suite)


 Pour essayer de se remettre dans le contexte, il faut d’abord se souvenir qu’au milieu des années 70 beaucoup d’individus de sexe masculin avaient les cheveux plus ou moins longs. Chez les jeunes, c’était une norme. J’avais des cheveux ondulés et bruns dans le genre Marc Bolan ou Julien Clerc (deux chanteurs que j’appréciais). Rien de particulier du côté de la tenue. J’adoptais le style baba cool qui allait bientôt être dénigré puis renié avec l’arrivée des punks. Le contexte politique ? Giscard venait d’être élu. Certaines couvertures de Charlie Hebdo accrochées au mur de ma chambre moquaient le fringuant nouveau président.

jeudi 13 mars 2025

50 ans après


 J’aimerais écrire sur l’année 1975. L’idée de le faire un demi-siècle plus tard me plait bien mais c’est loin. Au moment de m’y mettre, je réalise que les images sont floues. Jusqu’à l’été, il ne s’est rien passé de marquant. J’allais au lycée et j’écoutais religieusement mes disques. De mémoire, Blood on the TracksTonight’s the Night, Y’a une route. Je parle de ceux qui venaient de sortir, dont j’avais lu une critique suffisamment excitante pour donner envie de l'acheter. Il y en a plein que j’ai ratés par manque d’argent de poche et que j’ai découverts beaucoup plus tard comme  Coney Island Baby ou Young Americans. A part la musique, la lecture de Charlie Hebdo, il me semble qu’il ne se passait pas grand-chose de marquant. 

lundi 17 février 2025

1975 forever

 

Le surgissement à l'écran d’un personnage peut entrainer par résonnance des souvenirs adjacents. Le portail qui mène au point d’où partent les corridors du Passé s’est entrouvert. A vrai dire je regardais assez souvent par-dessus depuis le début de l’année (l’effet cinquantenaire, probablement). J’attendais qu’un évènement déclenche l’expédition en direction de l’année 1975. C’est fait.  J’ai 17 ans, depuis la rentrée j’ai quitté mon village au bord de la Marne pour venir habiter Paris.


jeudi 23 janvier 2025


 

Comme dit la formule célèbre, à partir d’un certain âge on ne lit plus, on relit. Antoine Compagnon en a fait le sujet d’un cours au Collège de France. Bref, je suis arrivé à cet âge. Cela signifie que l’on se retrouve avec une assez grande bibliothèque (faire tenir tous les livres était un critère dans la recherche immobilière). Lorsqu’un livre est lu, on fouille dans les rayons à la recherche du prochain qui aura l’honneur de se trouver sur la table de nuit. On ouvre, on hume, on lit un passage ou deux, on remet en place et on recommence. Jusqu’au moment où le déclic se produit, entraînant l’envie d’entamer la lecture avec impatience. Cette fois, le choix s’est porté sur Le piéton de Paris de Léon-Paul Fargue à cause de la phrase suivante : « J’ai habité Passy autrefois, du temps que j’allais au lycée Janson. » Il se trouve que ce fut la même chose pour moi : même quartier, même lycée. Cela se passait en 1975. Nous aurons l’occasion d’en reparler ; je prévois en effet de commémorer ici l’année 75.