G-0C9MFWP390 Le Carnet de Joe Legloseur

samedi 3 mai 2025

C'est quoi le problème ?


 Un écologue n’est pas nécessairement un terroriste. Certes, il peut venir gâcher un peu la journée surtout si vous recevez ses dernière nouvelles en matinée (l'autre matin, c’était à propos de la disparition des insectes). Mais il a une excuse : il se trouve en possession de données scientifiques terrifiantes, tout s’accélère dans le mauvais sens et, comme dans un film hitchcockien, personne ne veut l’écouter. Ceux qui ont choisi le déni sont désormais suffisamment nombreux pour influer sur les élections. Après tout, pourquoi changer de modèle économique alors qu’on peut aisément faire disparaitre le problème en effaçant les données et en bloquant la recherche ? Il suffisait d’y penser.

vendredi 2 mai 2025

Les pires tyrans et les bons rois

 

« Contrairement au Confucius historique, le Confucius de Tchouang-Tseu embrasse dans une même réprobation les pires tyrans et les « bons rois » les plus universellement révérés. Ces derniers n’ont pas mieux valu que les premiers, affirme-t-il tranquillement, faits historiques à l’appui. Les uns ont été plus avides de prestige, les autres plus avides de possessions, voilà tout. Et ces deux formes d’avidité sont, chez les puissants de ce monde, des forces que nul ne peut arrêter. » Jean François Billeter, Etudes sur Tchouang-Tseu (Allia)

mercredi 30 avril 2025

Transe


 Je n’ai jamais vraiment écouté avec attention la production discographique récente de Nick Cave. Surprise. J’ai vibré devant mon écran en regardant l’enregistrement de son concert parisien, présenté au début comme le dernier show de la tournée. On a l’impression que le chanteur, les Bad Seeds, les choristes et le public ne forment plus qu’une seule masse d’énergie qui décolle de plus en plus dans une sorte de transe collective parfaitement contrôlée par un Nick Cave à la fois professionnel et charismatique. Il faut ajouter enfin que c’est très bien filmé. (Disponible jusqu’à la fin du mois de mai sur la plateforme d’Arte) 

mardi 29 avril 2025

CE QUI A CHANGE

 

Bill Térébenthine


Les dingues

Qui parlent tout seul

Dans la rue

On ne les remarque plus

Tout le monde parle dans la rue

Thierry la Fronde et Josh Randall

Appartiennent au passé

Nous n’avons plus leurs panoplies

 

Beaucoup de choses

Que nous avons aimées

Ont été perdues, égarées, oubliées

On essaie de le cacher

Mais nous sommes un peu largués

Seule consolation

Les plus jeunes le sont

Au moins autant que nous


lundi 28 avril 2025

Prémonitoire


 En 1983, Baudrillard notait dans Les Statégies fatales : l’incrédulité « s’étend aujourd’hui à tout ce qui nous est livré par le canal des media et de l’information, voire par celui de la science ».  Comme on dit, ça résonne en 2025. Il ajoutait ceci, qui est encore plus actuel : « Nous enregistrons tout mais nous n’y croyons pas car nous sommes nous-même devenus des écrans, et qui peut demander à un écran de croire à ce qu’il enregistre ? » On se demande pourquoi Baudrillard n’est pas plus cité par les penseurs auto-proclamés du déchiffrement du monde ? Il est vrai que la plupart d’entre eux se sont repliés dans un silence prudent.

samedi 26 avril 2025

Retraduire


Le livre de Paul Cain est traduit par
 Jacques-Laurent Bost et Marcel Duhamel en personne. La version française est agréable à lire, épurée, efficace, précise. D’où la surprise en découvrant une erreur incompréhensible. A un moment, les personnages doivent attendre quelqu’un dans une chambre d’hôtel. Le héros fait un somme tandis qu’un comparse a trouvé un « livre comique » pour s’occuper. Ce qui ne veut pas dire grand-chose. Il s’agit plutôt d’une bande dessinée (comic book). Il y avait pourtant un indice un peu plus loin : le personnage dit au héros que sa lecture lui a plu et qu’il aurait adoré « dessiner des caricatures ». Cette faute justifierait à elle-seule que le roman fasse l’objet d’une nouvelle traduction. Ce serait l’occasion d’actualiser certains dialogues alourdis par un argot vieillot qui sonne étrangement « tontons flingueurs ».

vendredi 25 avril 2025

Une issue

 

François Angelier, l’homme de Mauvais genre, trouve le réel «  d'un ennui sombre, tragique, bloqué, totalement sans intérêt » et il a bien raison. Pour prendre un exemple au hasard, qu’y-a-t-il de plus borné et prévisible qu’un agent immobilier ? Bref, le réel nous gonfle sérieusement et le fait de le scénariser sur le modèle des mauvaises séries puis de le diffuser non-stop sous forme d’info-spectacle n’y change rien. Ce sera toujours « d'un ennui sombre, tragique, bloqué, totalement sans intérêt ». Heureusement, on peut lire des nouvelles de Maupassant tendance fantastique et se laisser entrainer du côté de cet « inconnu qui est derrière le mur, derrière la porte, derrière la vie apparente ».