G-0C9MFWP390 Le Carnet de Joe Legloseur

jeudi 12 juin 2025

PUBLICATION


 STOP !Le dernier numéro tout nouveau tout frais du magazine du GFIV vient d'être mis en ligne. 20 pages d'art et de littérature pat Jane Sweet, Bill Térébenthine et votre cher Joe. Pour recevoir ce précieux cadeau chez vous il vous suffit de cliquer sur ce lien. Comme par magie, ce numéro apparaitra sur l'écran de votre ordinateur ou de votre téléphone.  

Avec Nabokov

 

Je me souviens avoir commencé par Lolita sur les conseils d’une fille à qui je venais de raconter le scénario de ma bande dessinée. J’avais 24 ans, des projets grandioses, et je travaillais comme veilleur de nuit dans un hôtel pour payer les pâtes et les cigarettes. Le roman de Nabokov m’avait aidé à tenir jusqu’au bout de la nuit derrière mon bureau de la réception. J’attendais ce moment. Et puis il y eut la période Ada ou l’ardeur qui fut assez longue (le roman est épais et je lis lentement). J’ai le souvenir d’une narration virtuose d’une liberté folle dans laquelle j’aimais me perdre. En ce moment, je lis avec un grand plaisir La vraie vie de Sebastian Knight, son premier roman en anglais. Le récit est une mise en abîme de la situation de Nabokov en tant qu’écrivain au moment de l’écriture du livre. En gros, le narrateur veut écrire sur Sebastian Knight, son demi-frère qu’il a peu connu et dont il admire les romans. Nabokov se plait à mettre en place une machinerie sophistiquée avec extraits des œuvres, témoignages contradictoires de ceux qui l’ont connu, critique d’une biographie médiocre et enquête sur les lieux où a vécu le sujet des recherches. C’est élégant, drôle, brillant, et d’une grande beauté. 

mercredi 11 juin 2025

L'éternel retour


Ce matin, après avoir lu un poème de Carver où il était question d’une araignée, j’ai repensé à celle qui apparaît régulièrement dans mon évier depuis quelques semaines. Je l’évacue à chaque fois en faisant couler de l’eau et finit toujours par réapparaitre après quelques jours. Elle doit s’arrêter au niveau du siphon puis remonter. Mais je n’ai pas envie de penser aux tuyaux d’évacuation. Je préfère la considérer comme une apparition, ce qu’elle est lorsque je la découvre immobile à côté de la cuvette. Je pourrais l’extraire et la libérer dans le jardin. Quelques verres d’eau et, prise dans un petit tourbillon, elle glisse en douceur dans les canalisations. Je l’ai revue hier en rentrant des courses. Elle est intacte. Les séjours dans les profondeurs ne semblent pas lui nuire. J’ai l’impression qu’un début de complicité s’installe entre nous. Ce n’est pas plus absurde que de devenir ami avec une IA.


mardi 10 juin 2025

Addiction

 

C’est plus fort que moi ; je finis toujours pas en reprendre une dose. Et à chaque fois, je me demande comment j’ai pu oublier à quel point ce truc pouvait me faire du bien. Je veux parler du blues. Pas le blues moderne joué par des blancs qui font étalage de leur dextérité sur le manche d’une guitare. Le blues, le vrai. Celui du début du vingtième siècle ; le Delta Blues, le blues électrique de Chicago, avec des prolongements qui vont jusque dans les années 60/70, rarement au-delà de manière convaincante. Au moment où j’écris ces lignes, je me soigne consciencieusement avec une compilation concoctée avec amour par Bill Térébenthine (qui a dessiné la pochette).


lundi 9 juin 2025

Dialogue


 

— Et les séries ?

— J’en regarde très rarement. Entre zéro et une par an.

— Tu t’en souviens ?

— La première saison de True Detective, Twin Peaks en commençant par The Return et, sur les conseils d’un contact à l’époque où j’étais sur Facebook, The White Lotus. Il y en a eu d’autres mais j’ai tout oublié.

— C’est le problème avec les séries. Grosse manipulation émotionnelle dont il ne reste rien. Et la dernière que tu as vue ?

— La troisième saison de The White Lotus, justement. J’avais entendu à la radio les critiques en parler de manière blasée, pas de surprises, rien de nouveaux, etc. Moi, j’ai bien marché. Il y a le thème du bouddhisme (ça se passe en Thaïlande), un bouddhisme pour touristes occidentaux friqués. L’intérêt, c’est que l’écriture du scénario, la typologie des personnages et leur évolution pendant leur séjour dans le club de vacances s’inspire des principes bouddhistes. Même si le procédé est artificiel, cela donne une sorte de profondeur à des gens qui ne présentent aucun intérêt en tant que stéréotypes (un homme d’affaires en burn out, une bourgeoise coincée, des copines d’âge mûr venue se défouler, un dragueur, masculiniste, une jeune idéaliste attirée par le monastère, etc.). Et gare à ceux qui ont un mauvais karma !

— Eh bien ! Présenté ainsi, ça donne presque envie.   

 

samedi 7 juin 2025

LES ZONES OBSCURES

 

Je suis passé à côté

De Nicole Croisille

Et de Lelouch

Je crois que c’est grâce à

Chabada que Pierre Barouh

A pu créer sa maison de disques

Ce n’est pas certain

Il y a des pans entiers

De la réalité

Qui restent obscurs

On pourrait passer le reste

De sa vie

A effectuer des recherches

Sans en faire le tour

Ce n’est pas une raison

Pour ne pas en parler

vendredi 6 juin 2025

Revue de presse

 

Pierre Clémenti et Bulle Ogier dans Les Idoles

Le Monde titrait sur une « bombe sanitaire ». Le cadmium est un cancérigène certain pour l’homme. Il est diffusé dans les sols par des engrais et est présent à des doses importantes dans les aliments les plus consommés (pain, céréales de petit déjeuner, pommes de terre...). Les médecins sonnent l’alarme sans effet pour le moment. Les dégâts sont pourtant considérables, notamment sur les enfants (très forte hausse de cancer du pancréas chez les très jeunes). La solution ? Obtenir que le gouvernement trouve le temps s’en occuper et accepte de  légiférer. En pleine période de recul sur les normes écologiques, ce n’est pas le meilleur moment. En attendant, les petits déjeuners avec céréales à gogo pour les enfants sont déconseillés. Consommer du bio permettrait de limiter les risques mais la filière a été marginalisée, comme le souhaitait la FNSEA. Dans le supplément Livres, nous retenons la parution des entretiens avec Marc’O (98 ans) aux éditions Allia. Sur le site del’éditeur, on peut lire ceci : « Au fil d’innombrables rencontres (Boris Vian, André Breton, Guy Debord, Jean Eustache, Jacques Lacan, Jean-Luc Godard...), L’Art d’en sortir nous immerge dans l’effervescence d’une époque éprise d’art et de révolution, qui voulait abolir toutes les frontières : la théorie et la pratique, la scène et le public. » Ne l’oublions pas.


jeudi 5 juin 2025

Lecture

Jules Barbey d'Aurevilly

Dans la première nouvelle des Diabolique, un narrateur se souvient d’une jeune fille qu’il avait rencontrée chez des gens qui lui louaient une chambre. Ils la lui présentèrent comme leur fille. Plus que sa beauté, ce qui frappa fortement le jeune homme de 17 ans à l’époque fut « l’air qu’elle avait » (c’est moi qui souligne). « Une espèce d’air impassible, très difficile à caractériser. » Cet air « qui la séparait non pas seulement de ses parents, mais de tous les autres, dont elle semblait n’avoir ni les passions, ni les sentiments, vous clouait... de surprise... sur place. » Cet air « n’était ni fier, ni méprisant, ni dédaigneux, non ! mais tout simplement impassible, car l’air fier, méprisant, dédaigneux, dit aux gens qu’ils existent, puisqu’on prend la peine de les dédaigner ou de les mépriser, tandis que cet air-ci dit tranquillement : « Pour moi, vous n’existez même pas. »

 

 

mercredi 4 juin 2025

Le capitaine est en colère


 Quelques suggestions pour compléter la liste des jurons du capitaine Haddock. « Maître à penser, nihiliste, pseudo-philosophe, pape, mentor, magnétiseur, pantin sanglant, fanatique de lui-même, diable, éminence grise, âme damnée, professeur ès radicalisme, gourou, révolutionnaire de bazar, Méphisto de pacotille, extravagant, fumeux, mauvais ange, idéologue, sadique fou, cynique total, lie de la non-pensée, enragé, envouteur, et pire que tout : théoricien... » Extrait du relevé des termes utilisés dans la presse à son sujet effectué par Guy Debord (Considérations sur l'assassinat de Gérard Lebovici).