G-0C9MFWP390 Le Carnet de Joe Legloseur

mercredi 2 juillet 2025

POSITIF

 

Le problème avec les micros-trottoirs

où l’on interroge des vrais gens

sur la canicule

c’est qu’on ne sait jamais si

ils sont représentatifs

de la majorité

prête à s’adapter docilement

aux pire situations

sans jamais s’énerver

contre les responsable politiques

qui ne tiennent pas

leurs engagements

 pour ralentir

le changement climatique

ou bien si les entretiens ont été

soigneusement sélectionnés

pour faire passer un message

fataliste

c’est comme ça

faut s’adapter

c’est la faute à personne

et surtout

conservez la bonne humeur

mardi 1 juillet 2025

L'abri

 

Un peu d’air frais entre par le velux entrebâillé. Fats Domino chante en sourdine tandis que, dehors, la pluie tombe doucement. Le chien dort sur mes genoux. Il est calme, comme moi. Cela fait du bien d’être seul de temps en temps, à l’abri du feu des critiques (même justifiées). Je lis trop de romans et de poèmes ; je n’ai jamais d’idées pour occuper les loisirs. Tout cela est vrai. Je peux peut-être réussir à modifier certains paramètres. En attendant, j’ai besoin d’un abri sûr pour souffler et de rien d’autre.


lundi 30 juin 2025

Humour climatique

Ceci est une projection en 2050

 « Il y a toujours eu des vagues de chaleur. » J’entends d’ici les climato-négationnistes ricaner. Ils peuvent s’amuser sereinement : chaque été leur apportera avec certitude l’occasion d’afficher leur indépendance d’esprit, leur supériorité intellectuelle et leur méfiance éclairée vis-à-vis des scientifiques catastrophistes. Ils n’ont aucune raison de s’inquiéter. Leurs habitudes ne seront pas changées par des normes écologiques absurdement punitives. C’est vrai, un french Trump nous garantirait définitivement contre toute tentative visant à perturber la tradition ancestrale de la vague de chaleur et du barbecue sur la terrasse.

samedi 28 juin 2025

MEDITATION

 

Je suis assis par terre

dans le couloir

essayant de ne penser à rien

et n’y parvenant pas

je revois une photo

j’étais assis sur un muret

exactement dans la même position

jambes repliées

j’avais 16-17 ans

c’est très loin

je pense au temps écoulé

avec l’impression étrange

d’être à la fois

sur le muret ET dans le couloir

je suis perplexe

la séance est interrompue

je me lève

en me demandant

s’il s’agit

d’une illumination

vendredi 27 juin 2025

Esprit

Barbey par Nadar

 En 1850 Le Dessous de cartes d'une partie de whist parut en feuilleton, en trois parties, dans le journal La Mode — la Revue des deux Mondes l'ayant refusé (Wikipédia). Déjà à cette date, Barbey considérait l’art de la conversation, « cette fille expirante des aristocraties oisives », comme une chose du passé. Le salon d’une baronne pour laquelle le narrateur manifestait la plus grande admiration constituait le dernier refuge de l’Esprit. « C’est là que chaque soir, écrit l’auteur, jusqu’à ce qu’il se taise tout à fait, il chante divinement son chant du cygne. » Et Barbey précise un peu plus loin, pour décrire cet art de la causerie : « Rien n’y rappelle l’article du journal et le discours politique, ces deux moules si vulgaires de la pensée, au dix-neuvième siècle. »

jeudi 26 juin 2025

Vocabulaire


 A propos d’un politicien qui a quelques petits ennuis, je lis ceci : « une haut fonctionnaire a déposé, le 20 juin, une plainte avec constitution de partie civile pour prise illégale d’intérêts, harcèlement moral, favoritisme, détournement de fonds publics et concussion. » Je n’avais jamais fait attention au mot « concussion » qui sonne bizarrement au sein de cette énumération d’actes plus ou moins condamnables. S’agit-il d’une manière tordue d’installer son autorité, d'une forme de maladie psychiatrique, d’une perversion particulièrement vicelarde ? Rien de tout cela. Le mot désigne simplement la façon dont un fonctionnaire tente d’arrondir ses fins de mois en percevant des sommes qui ne sont pas dues. Et alors ? Rien. Il est toujours agréable d’enrichir son vocabulaire.

mercredi 25 juin 2025

Relecture


 Allez savoir pourquoi, j’ai soudainement eu envie de relire un vieux bouquin de ce cher Bukowski. Pas un recueil de poèmes, plutôt la prose narrative. J’ai pensé à Women que j’avais emprunté dans une bibliothèque à l’époque où j’étais fauché. La question en arrière-plan était « N’aurions pas légèrement surestimé l’écrivain en raison de sa personnalité et la faiblesse de la concurrence ? » Le temps a passé, l’auteur nous a quitté ; c’est le bon moment pour une réévaluation. Verdict : ça tient plutôt bien la route. Le dosage entre détails réalistes et distance imprégnée d’humour fait passer cette succession de rencontres jamais parfaitement harmonieuse (c’est l’aspect réaliste) mais pas complètement nulles non plus (c’est la goutte d’optimisme). L’écriture est efficace. Les phrases coulent toute seules et vous entrainent à chaque page. Les scènes de disputes et de sexe sont répétitives, comme dans la vie. Elles évoquent parfois des souvenirs. Et puis je redécouvre à quel point Bukowski est un bon dialoguiste. Tout y est dans les scènes de couple : la jalousie, les enjeux de pouvoir, la tendresse qui se faufile à travers les sacs de sable, les souffrances accumulées, sans oublier le désir et les besoins corporels.

mardi 24 juin 2025

PARLER AVEC LES ARBRES

 

J’écoute le dernier Neil Young

c’est un bon disque

un de plus

peu importe qu’il ne nous surprenne plus

depuis longtemps

ce que Dylan parvient à faire à sa façon

l’important, c’est qu’il soit là

presque intact

comme Joan, Bruce

et quelques autres survivants

tant qu’ils seront là

nous aurons moins l’impression

qu’un film se déroule en arrière

et en vitesse accélérée

effaçant tout ce qui a précédé

pour restaurer ce qu’il y a eu de pire

le vieux Neil est là

il tient bon



lundi 23 juin 2025

Citations de la semaine

Bill Térébenthine

 Entendu en passant devant un poste radio : « Il y a une allergie du nationalisme à la façon dont l’exercice de l’intelligence peut le contester. » Lu dans un vieux manuel de méditation chinois, cette citation de Lao Tseu : « Celui qui parle au nom de la vertu ne la possède surement pas. » Et puis cette réplique de Hank dans Women : « Je ne peux pas arrêter d’écrire. C’est une forme de folie. »